Engins agricoles autonomes Des robots bientôt dans tous les champs ?
Le gouvernement lance des expérimentations sur les engins agricoles autonomes travaillant dans les champs afin de faire évoluer la réglementation. Une démarche poussée par les agriculteurs confrontés à une pénurie de main-d’œuvre et les constructeurs qui commencent déjà à mettre des robots sur le marché.
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C’est l’illustration parfaite de l’expression « revenir du diable Vauvert ». Alors que la perspective d’accueillir des robots des champs dans les exploitations françaises avant 2030, voire 2040, semblait totalement utopique en raison d’une réglementation très contraignante, le gouvernement vient d’ouvrir une immense brèche. À la surprise générale, il lance les premières étapes d’une démarche visant à lever les freins à une adoption massive de ces véhicules.
> À écouter aussi : Notre podcast, comment un robot vous fait gagner du temps dans les champs (08/09/2021)
Les cultures à la traîne
La robotique n’est pas un tabou dans l’agriculture. Les robots sont même devenus des outils presque comme les autres dans les élevages, où ils peuvent se charger de la plupart des astreintes, dont la traite et le raclage. Pour les cultures, la réglementation empêche pour le moment tout engin agricole autonome de travailler seul dans une parcelle à plus de 1 km/h et de se déplacer sur la route. Actuellement, seules les petites unités comme celles de Naïo Technologies ou FarmDroïd peuvent donc travailler en plein champ. Les robots plus volumineux comme l’Anatis de Carré sont cantonnés aux milieux fermés des serres s’ils travaillent à plus de 1 km/h.
Mais ces freins réglementaires n’arrêtent pas les constructeurs, qui vendent sur tous les marchés, et en particulier ceux qui ouvrent déjà en grand la porte à ces engins autonomes comme l’Australie, le Brésil, la Russie et les États-Unis. Depuis un an, les tractoristes multiplient les rachats stratégiques de start-up et entreprises spécialisées dans la robotique. Plus étonnant, les équipementiers, en particulier les Allemands, se lancent aussi dans l’aventure. Horsch développe ainsi plusieurs solutions robotisées, du pulvérisateur au semoir, tandis que Lemken et Krone se sont associés pour proposer un porteur polyvalent.
Un réel besoin
Sur le terrain aussi, la demande pour des solutions automatisées augmente. Confrontés à une pénurie de main-d’œuvre, en particulier pour les tâches répétitives et nécessitant peu de qualification comme le déchaumage et le désherbage mécanique, de nombreux agriculteurs voient dans la robotique une solution d’avenir. D’autres font leurs comptes et évaluent la rentabilité d’une telle solution, par exemple dans le cadre de la réduction des IFT ou d’une conversion à l’agriculture biologique.
Revoir le code de la route
Le besoin est là, la technologie existe : la balle est donc dans le camp du législateur. Qui l’a saisie au bond dans sa feuille de route « Agriculture et numérique » dévoilée par Julien Denormandie lors du Sia en février dernier. Le gouvernement préconise en effet d’étudier la sûreté de fonctionnement des machines agricoles autonomes évoluant en milieu ouvert afin de permettre leur homologation, la modernisation de la réglementation et leur utilisation dans les fermes françaises.
Afin de moderniser la réglementation, en accord avec la protection des personnes et de l’environnement dans lequel évolueront ces engins autonomes, France Expérimentation conduira des essais selon trois axes. Le premier concerne la conformité des machines autonomes dans un environnement de plein air avec la directive machine, notamment Iso 18497. À cet effet, les expérimentations seront menées sur une plateforme de tests, en suivant différents protocoles. Le second axe évalue la conformité avec la réglementation routière. L’objectif de ce point stratégique est de montrer que le passage d’une parcelle à l’autre peut se faire dans des conditions de sécurité satisfaisantes. Les essais pourront ainsi porter sur la traversée de certains chemins ruraux et communaux ou sur le survol de terrain pour les drones robotisés. Cette étape va plus loin que ce qui était demandé par les agriculteurs, à savoir l’utilisation autonome dans une parcelle donnée.
Le dernier point concerne la cybersécurité des machines autonomes. Encore peu étudié, il devra aboutir à la conception de guides sur la prise en compte des enjeux de cybersécurité dès la conception. Cet axe de travail sera articulé avec d’autres projets de la feuille de route portant sur les données agricoles.
Parallèlement, les professionnels sont en attente des conclusions de l’expérimentation menée entre 2019 et 2021 sur l’utilisation de drones télépilotés pour l’épandage aérien de produits phytosanitaires. L’Anses est en train d’évaluer les résultats. Les expérimentations sur les robots terrestres devraient aussi se dérouler sur deux ans. Le temps pour les agriculteurs d’évaluer l’intérêt économique d’un tel investissement et d’en mesurer les bénéfices connexes, comme la collecte d’une plus grande quantité de données pour piloter les décisions stratégiques.
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